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La régulation des lâchers de petits gibiers

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2024
  • N° : 406 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 24/04/2024
    • de WITSEL Thierry
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Le collectif « Stop dérives de la chasse », que nous avons reçu en audition précédemment, tente de conscientiser concernant les lâchers de petit gibier.

    Il prend ainsi l'exemple de Clavier, en province de Liège. En effet, dans cette ville, il y a eu un très gros cluster de grippe aviaire qui s'est propagé à cause du nombre élevé de volatiles relâchés pour la chasse.

    Chaque année, des milliers de faisans et de canards sont importés en camion, nourris au cœur du village, puis lâchés pour être chassés dans des conditions pour le moins discutables.

    Les risques de ces lâchers de petit gibier touchent plusieurs des compétences de Madame la Ministre : le bien-être animal, le volet sanitaire, avec notamment l'impact sur des espèces protégées (par exemple, la grippe aviaire), mais aussi le volet environnemental, en ce qui concerne la qualité de l'eau à cause des très nombreux canards qui abîment les berges et défèquent dans l'eau.

    En Flandre, cette pratique est interdite.

    Il y a un peu plus d'un an, à la suite d'une pétition, nous adoptions des conclusions demandant que le Gouvernement engage une réflexion sur le lâcher de petit gibier et plus précisément la perdrix.

    Une réflexion sur le lâcher de petit gibier a-t-elle été menée ? Avec quels résultats ?

    Des mesures vont-elles être prises dans ce sens ?
  • Réponse du 26/04/2024
    • de TELLIER Céline
    Comme l’honorable membre, je suis convaincue que les pratiques de chasse, dont le lâcher de gibiers, doivent évoluer. Que ce soient pour des raisons liées au bien-être animal, à l’environnement, à la protection de la biodiversité ou à la santé, la société civile demande des changements, tout à fait légitimes.

    En effet, d’un point de vue éthique, le fait d’élever des animaux, c’est-à-dire les nourrir, les héberger, et les habituer aux humains, pour ensuite prétendre les « chasser » est très questionnable. Au niveau sanitaire, lâcher massivement des animaux d’élevage est très risqué, notamment dans un environnement déjà fragilisé par la grippe aviaire par exemple. Je rappelle que cette maladie présente un risque de mutation pouvant affecter les humains, comme l’indiquent l’EFSA et l’OMS Europe. La pollution des eaux, la destruction de la biodiversité par la prédation, les nuisances sonores sont d’autres impacts négatifs de cette pratique.

    Actuellement, la pratique du lâcher est seulement cadrée au niveau fédéral. L’achat d’oiseaux de repeuplement libérés dans les sept jours doit être enregistré auprès de l’ARSIA ou de la DGZ. Si ces oiseaux sont élevés en vue de lâchers, une autorisation de l’AFSCA est requise. Les mouvements transfrontaliers sont aussi sujets à des règles sanitaires. Il s’agit par exemple d’un certificat sanitaire, ou encore de la mention du lieu de destination approuvé par l’AFSCA.

    Au niveau de la Wallonie, les lâchers ne sont soumis à aucune autorisation spécifique. La seule contrainte est celle prévue par l’article 12 de la Loi sur la Chasse. Les lâchers doivent avoir été effectués au plus tard 30 jours avant l’ouverture de la chasse à l’espèce concernée. Néanmoins, depuis septembre 2021, la chasse à la perdrix grise est conditionnée par la réalisation de plans de gestion triennaux, incluant notamment des actions de restauration de son habitat.

    Il est donc temps d’avancer. Nous travaillons notamment sur le bien-être des animaux sauvages. J’ai demandé au Conseil wallon du Bien-être des Animaux de se positionner sur la question, avec le soutien de l’Université de Liège. Nous venons de publier un premier avis, qui traite des méthodes de mise à mort du grand gibier. Pour la suite des travaux, j’ai demandé au Conseil d’analyser la question des piégeages, mais aussi celle des lâchers de gibiers. Je suis convaincue que l’avis du Conseil sur ces questions importantes sera une excellente base pour permettre au Gouvernement d’améliorer la protection des animaux sauvages. J’ai d’ailleurs transmis le premier avis du Conseil à mon collègue en charge de la Chasse, le Ministre Borsus. J’invite également l’honorable membre à le solliciter sur ce sujet, auquel il est visiblement sensible.

    Cette thématique a également été abordée lors de l’enquête publique sur la Stratégie Biodiversité 360°. Il est ainsi proposé, lors des rempoissonnements, des repeuplements et autres lâchers d’espèces dans la nature autorisés par la législation en vigueur, de porter une attention à une série d’éléments. Il s’agit notamment de la capacité d’accueil du territoire ou du milieu, du risque de transfert de maladie ou de pollution génétique.

    En conclusion, comme on le constate, il existe encore des marges d’amélioration pour rendre la chasse plus respectueuse de l’environnement et des animaux. À cet égard, le Conseil wallon du Bien-être des Animaux et le Collectif Stop Dérives Chasse, que cite l’honorable membre, formulent des recommandations très concrètes. À nouveau, je ne peux qu’inviter à solliciter mon collègue en charge de la Chasse, le Ministre Borsus, sur la prise en compte de ces préoccupations bien légitimes. C’est d’ailleurs au sein de sa commission que l’audition mentionnée a eu lieu. Il serait intéressant de connaitre les suites concrètes apportées par mon collègue, aux demandes formulées par la société civile et par l’assemblée de l’honorable membre. Au lieu de perpétuer des pratiques néfastes pour le bien-être des animaux, l’environnement, et les communautés locales, au bénéfice de quelques-uns, il est urgent d’établir une relation plus respectueuse entre les humains et la nature.