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Les éoliennes d'Estinnes

  • Session : 2010-2011
  • Année : 2011
  • N° : 521 (2010-2011) 1

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  • Question écrite du 03/02/2011
    • de EERDEKENS Claude
    • à HENRY Philippe, Ministre de l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de la Mobilité

    En réponse à une précédente question écrite (n° 388) que j'avais posée, il m'a été notamment répondu ce qui suit :
    « L'application de la norme internationale Deutsches Windernergie-lnstitut DEWI relative aux risques de projection de morceaux de glace, qui détermine dans le cas d'Estinnes un périmètre de sécurité de minimum 389 m (D + H x 1,5), a imposé une distance de sécurité supérieure vu la proximité d'un pipe-line de l'OTAN. La distance minimale par rapport aux habitations est, quant à elle, de 700 m. Compte tenu de la distance d'éloignement, les fonctionnaires délégué et technique n'ont pas exigé l'installation d'un système de dégivrage. ».
    Or, dans l'arrêté d'octroi du permis (article 4, point 11), il est mentionné qu'un système de chauffage des pales doit équiper les éoliennes.
    Il a été précisé ce qui suit à ce propos :
    « Risque de chutes de glace :
    Les éoliennes sont équipées d'un système de détection automatique des conditions dangereuses sur base des mesures météorologiques ainsi que d'un système de chauffage des pales afin de prévenir la formation de glace ».

    A supposer qu'à Estinnes, il n'y ait pas de mise en place d'un chauffage de pâles, Monsieur le Ministre considère-t-il cette absence de chauffage des pâles comme une infraction au permis?

    A-t-on pu vérifier que les pâles installées sont bien celles prévues dans l'étude d'incidences et dans la demande d'autorisation?

    D'autre part et vis-à-vis de ces éoliennes d'Estinnes réalisées par Enercon en qualité de constructeur éolien, il était écrit ce qui suit dans le magazine Windblatt 04/2008 d'Enercon :
    " E-126/6 MW in Georgesfeld, East Frisia and Estinnes, Belgium
    Currenrly. Enercon is in the process of installing further E-126/6 MW prototypes in East Frisia and Belgium. Because of the enormous size of the components, installation can be quite a challenge. This task will, however, soon he eased hy a new crane ".

    Est-il bien exact, comme l'affirment certains riverains que les éoliennes d'Estinnes, le caractère expérimental aurait fait de ce village hennuyer un laboratoire pour la société Enercon ?

    Monsieur le Ministre peut-il expliquer comment des prototypes, c'est ainsi que les appelle Enercon, peuvent être certifiés et être homologués en Région wallonne?

    Une telle pratique est-elle ou non une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Le premier prototype de la E-126 a été installé en novembre 2007 en Allemagne.

    Monsieur le Ministre pourrait-il nous expliquer sur quels paramètres l'étude d'incidence (juin 2005) s'est basée? A l'époque, les paramètres de la E 112 n'étaient qu'en partie disponibles sans rappeler que ce modèle est resté au stade de prototype.

    Monsieur le Ministre considère-t-il que le fait d'installer des prototypes à Estinnes constitue une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Monsieur le Ministre peut-il nous préciser la valeur de l'étude d'incidences datant de 2005?

    Sur le site de la Communauté européenne, on nomme ce projet par l'acronyme « 7MW-WEC-BY-11 » :


    Détails concernant le projet
    Acronyme du projet : 7MW-WEC-BY-11
    Référence du projet : 219055
    Date de commencement du projet : 2008-08-01
    Durée : 48 mois
    Coût du projet: 6.17 millions d'euros
    Type de contrat: collaborative project (generic)
    Date d'achèvement: 2012-07-31
    Statut du projet: exécution
    Financement du projet: 3.27 millions d'euros

    Lors de l'inauguration par le commissaire européen M. Piebalgs, personne ne cache la puissance des éoliennes (7 MW). On parle sur internet (site Enercon) de 7,5 MW.

    Cependant l'article 2 de l'arrêté d'octroi porte sur des éoliennes de 5/6 MW.

    L'article 1 est écrit en ces termes :
    « L'objet de l'autorisation porte sur l'implantation d'un parc de onze éoliennes avec pour chacune un transformateur électrique de puissance unitaire 5 à 6 MWA intégrée dans le mât et sur l'aménagement de chemins d'accès et d'aires de maintenance ».

    Monsieur le Ministre considère-t-il cette situation comme une infraction à l'arrêté d'octroi du permis ?

    Est-il exact qu'il existerait un transformateur installé en terre en plein milieu du parc éolien d'Estinnes ?

    Quelle est la distance par rapport au pipe-line à haute pression de l'OTAN?

    Le point 8 de l'article 4 parle des ombres portées. Il est écrit ce qui suit :
    « Ombres portées/effet stroboscopique :
    Aucune habitation ne peut être soumise à l'effet stroboscopique pendant des durées supérieures à 30 heures par an et 20 minutes par jour. calculées sur base de la durée réelle d'ensoleillement.
    L'exploitant prend toutes les mesures nécessaires pour respecter ces valeurs, à cette fin les éoliennes sont équipées d'un dispositif technique de mesures d'ensoleillement qui commande l'arrêt de l'éolienne pendant les périodes critiques d'ensoleillement ».

    Quelle est la durée pour la cité du Monstier à Bray ?

    Le fait que ces ombres balaient la chaussée Binche/Mons (très fréquentée) ne constitue-t-il pas un risque pour les usagers de cette route ? Peut-on considérer l'ombre d'un mât au soleil couchant dans la cuisine d'une maison comme une nuisance ?

    Y a-t-il ou non infraction en l'espèce ?

    Comment Monsieur le Ministre compte-t-il y remédier ?

    Le point B de l'article 4 parle des ombres portées :
    « Les mesures sont effectuées à l'extérieur des habitations, si possible à au moins 3.50 mètres de toutes structure réfléchissante autre que le sol. Dans les 6 mois de la mise en exploitation du parc éolien, l'exploitant fait réaliser par un organisme agréé en matière de bruit, une campagne de mesure de bruit visant à déterminer le respect des conditions citées ci-avant et la nécessité ou non de brider certaines machines ».

    L'étude qui devait être réalisée dans les six mois de la mise en exploitation du parc éolien a-t-elle été réalisée et communiquée à la Région wallonne?

    A défaut, s'agit-il ou non d'une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Est-il exact que ce parc éolien est à la base d'une émission «anormale» de basses fréquences ?

    Quelles sont les conséquences sur la santé d'une exposition prolongée à ces basses fréquences?

    A-t-on pu vérifier en l'espèce si l'étude de bruit mesure bien les infrasons et les basses fréquences?

    Quelle est la position du Gouvernement wallon face à une situation qui suscite l'inquiétude compréhensible et croissante d'un certain nombre de riverains?
  • Réponse du 12/05/2011 | Annexe [PDF]
    • de HENRY Philippe

    A - Dans l'arrêté d'octroi du permis relatif au parc éolien d'Estinnes (société SA Windvision Windfarm), il est mentionné qu'un système de chauffage des pales doit équiper les éoliennes. A supposer qu'à Estinnes, il n'y ait pas de mise en place d'un chauffage de pales, Monsieur le Ministre considère-t-il cette absence de chauffage des pales comme une infraction au permis? A-t-on pu vérifier que les pales installées sont bien celles prévues dans l'étude d'incidence et dans la demande d'autorisation?

    Il est exact qu'un tel chauffage des pales en vue d'obvier aux éventuelles chutes de glace était prévu dans le permis initial délivré pour le parc d'Estinnes, par les fonctionnaires technique et délégué, en date du 31 janvier 2006 (réf.: D3400/56085/RGPED/2005/8/DV-PU & F0412/56085/PU3/2005.1 ).

    Cependant, en juin 2008, la même société a introduit auprès de l'administration wallonne une demande de modification des conditions particulières d’exploitation, en vertu de l'article 65 du décret du 11 mars 1999' relatif au permis d'environnement, visant précisément à remplacer l'imposition de mise en œuvre du système de chauffage de pale par un système d'enregistrement de détection en continu des risques de formation de glace, assorti d'une signalisation préventive au droit des aires de maintenance des éoliennes.

    Le principe est le suivant: en permanence, des capteurs contrôlent et enregistrent la vitesse de rotation du rotor, la vitesse du vent et la production électrique instantanée. L'analyse des données enregistrées permet d'établir des corrélations entre ces. différents paramètres. Lorsque du givre apparaît sur les pales à un instant « t », la vitesse de rotation du rotor diminue à cause des pertes aérodynamique engendrées et la production électrique diminue en conséquence. Or, l'historique des paramètres enregistrés montre que la vitesse du vent mesurée à l'instant « t » est liée à une production et une vitesse de rotation plus élevées et qui ne sont pas atteintes à cet instant. Ces données, couplées à la mesure permanente de la température ou encore du niveau de vibration dans le mât, sont interprétées par le système et l'éolienne est mise à l'arrêt.

    La formation de glace ou de givre sur les pales d'une éolienne peut ainsi être efficacement détectée par un programme d'analyse des conditions climatiques et des paramètres de fonctionnement de l'éolienne, présent sur chaque machine. Une telle détection engendre l'arrêt immédiat de l'engin, le temps nécessaire à l'achèvement complet de la fonte du givre ou de la glace.

    Remarquons qu'un système de chauffage des pales autoriserait uniquement une remise en service plus rapide de l'installation de production d'électricité! L'option de chauffer les pales peut avoir l'effet pervers de précipiter la chute de conglomérats de glace qui se détacheraient « en bloc », suite au réchauffement rapide de la surface de contact entre la pale et la glace alors que la fonte naturelle de la glace diminue fortement cette probabilité de chute.

    La seule conséquence négative résultant du fait de ne pas utiliser le chauffage des pales est donc une diminution du facteur de capacité énergétique du parc éolien, étant donné la diminution du temps de production. Il faut cependant relativiser cette dernière considération au regard de la puissance nominale développée par chaque machine ainsi qu'au regard du phénomène de réchauffement climatique qui va de pair avec une diminution du nombre de jours de gel enregistrés par les stations météorologiques régionales.

    L'arrêt de la machine suite à une détection de givre ou de glace n'obvie cependant pas, de facto, à la chute de stalactites de glace (en conséquence de la fonte naturelle). Il convient ainsi de rester prudent à proximité des machines et particulièrement, dans l'aire de surplomb, même si la zone agricole dans laquelle les éoliennes sont implantées n'est pas très fréquentée par le public. C'est pourquoi une signalisation adaptée a été imposée pour compléter la modification des conditions d'exploitation.

    En réponse à la question posée, il n'y a donc aucune infraction au permis délivré, amendé par l'arrêté de modification de la condition particulière d'exploitation sus-évoqué. Les pales installées, nanties du système de détection, sont conformes aux prescriptions que l'établissement se doit de respecter et correspondent à la description réalisée par le bureau ARIES dans l'étude d'incidences environnementales.



    B - Est-il bien exact, comme l'affirment certains riverains des éoliennes d'Estinnes que le caractère expérimental aurait fait de ce village hennuyer un laboratoire pour la société ENERCON ?

    Tout d'abord, il est important de préciser que la phase expérimentale du prototype E-126 a été développée en Allemagne, à Emden et Aurich, à proximité des implantations de la société ENERCON GmbH. Huit éoliennes E-126 ont ainsi été assemblées, mises en fonction et analysées au niveau de leur comportement, leur productivité, leur courbe de puissance, leurs émissions sonores, etc.

    S'il est exact de dire que le parc de Windvision Windfarm Estinnes SA à Estinnes est la première réalisation industrielle sous forme de parc (et non sous forme d'une éolienne individuelle), de par le monde, de ce type de machine, il est cependant faux d'assimiler de Estinnes, un laboratoire. Néanmoins, comme toute « première» technologique, celle-ci doit faire ses maladies de jeunesse et les problèmes de dépassement de bruit constatés au printemps 2010 en sont un exemple tangible.



    C - Monsieur le Ministre peut-il expliquer comment des prototypes, c'est ainsi que les appelle ENERCON, peuvent être certifiés et être homologués en Région Wallonne? Une telle pratique est-elle ou non une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Il n'existe aucune homologation wallonne de ce type de machine. Il existe, par contre:
    * des normes et directive européennes:
    1- Au niveau de la normalisation européenne, la norme EN 50-308 « aérogénérateur, mesures de protection exigences pour la conception, le fonctionnement et la maintenance » a été élaborée par le CENELEC sur mandat de Commission Européenne, afin de pouvoir constituer une norme « harmonisée » au titre de « la directive Machines ». L'objet de cette directive est, d'une part, d'améliorer la sécurité des machines mises sur le marché en Europe en fixant les exigences essentielles de santé et de sécurité relatives à la conception et à la construction et, d'autre part, de faciliter leur libre circulation (directive 2006/42/CE transposée dans le droit belge par l'arrêté royal du 12 août 2008).

    * des normes internationales :
    1- La norme IEC 61400-1 intitulée: « Eoliennes - Partie 1 : Exigences de conception » : elle spécifie les exigences de conception essentielles pour assurer l'intégrité technique des éoliennes. Elle a pour objet de fournir un niveau de protection approprié contre les dommages causés par tous les risques pendant la durée de vie prévue. Cette norme concerne tous les sous-systèmes des éoliennes tels que les mécanismes de commande et de protection, les systèmes électriques internes, les systèmes mécaniques et les structures de soutien. Elle s'applique aux éoliennes de toutes dimensions.
    2- La norme IEC 61400-11 : « Aérogénérateurs - Partie 11 : Technique de mesure acoustique du bruit ».
    3- La norme IEC 60204-1:1997, Sécurité des machines - Équipement électrique des machines - Partie 1: Exigences générales.
    4- La norme IEC 60204-11 :2000, Sécurité des machines - Équipement électrique des machines - Partie 11: Prescriptions pour les équipements HT fonctionnant à des tensions supérieures à 1 000 V c.a. ou 1 500 V c.c. et ne dépassant pas 36 kV.

    Le modèle E-126 d'ENERCON répond évidemment aux exigences prescrites par ces différentes normes. De nouveau, aucune infraction au permis délivré n'est à déplorer à ce sujet.



    D - Le premier prototype de la E-126 a été installé en novembre 2007 en Allemagne. Monsieur le Ministre pourrait-il nous expliquer sur quels paramètres l'étude d'incidences (juin 2005) s'est basée? A l'époque, les paramètres de la E-112 n'étaient qu'en partie disponibles sans rappeler que ce modèle est resté au stade de prototype.

    Pour rappel, en 2005, le modèle E-112 en était au stade du prototype. Une dizaine de machines ont été implantées dans le monde entre 2004 et 2005, dont la plupart en Allemagne. Seuls quelques points de la courbe acoustique étaient alors connus pour ce modèle. Le modèle E-112 a évolué vers le modèle E-126 dont la production de série a commencé en 2007. Toutes les données concernant l'acoustique de l'E-126 n'étaient pas encore disponibles auprès du constructeur pour ce modèle à l'époque de l'EIE.

    En raison de cette absence de données techniques nécessaires pour une cartographie des incidences sonores, le respect des critères de bruit applicables en Région wallonne ne pouvait donc être vérifié pour cette variante dans le cadre de l'étude d'incidences. Une démarche particulière a donc été adoptée. Celle-ci consiste à déterminer les puissances acoustiques maximales des éoliennes garantissant le respect des valeurs limites fixées par la législation en matière de permis d'environnement et des critères retenus dans le cc Cadre de référence pour l'implantation des éoliennes en Région wallonne .. (Wind Norm Curve néerlandaise, WNC).

    Ces valeurs dépendent de l'affectation au plan de secteur de la zone d'immission concernées et de la période considérée (jour, transition, nuit). Sur base du cadre réglementaire, les valeurs limites de l'arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2004 sont considérées pour des vitesses de vent inférieures ou égales à 5 m/s. Pour des vitesses supérieures à 5 m/s, les courbes normatives néerlandaises sont considérées comme préconisées par le cadre de référence wallon. Selon la zone et la période considérée, il s'agit des courbes WNC-40, WNC-45 ou WNC-50.

    On obtient ainsi en fonction de la vitesse du vent et de la période concernée une valeur limite à ne pas dépasser par l'ensemble du parc éolien.

    Les valeurs limites étant définies au niveau des zones d'immission les plus proches, il est possible de déterminer la puissance acoustique maximale que chaque éolienne devrait respecter individuellement afin de gara~tir le respect de ces valeurs par l'ensemble du parc de 12 éoliennes (12 éoliennes étant le nombre de machines prises en compte pour la réalisation de d'étude d'incidences. Suite aux recommandations de l'étude d'incidences, la demande de permis a porté finalement sur 11 éoliennes).

    Les calculs ont été réalisés selon des hypothèses identiques aux modélisations effectuées pour les éoliennes de classe 2 MW en ce qui concerne le relief et la nature du sol, les conditions météorologiques, l'hypothèse du vent soufflant depuis chaque éolienne dans toute les directions, le facteur de sécurité de + 1,3 dB[A], etc. En ce qui concerne le spectre d'émission du modèle E-126, le spectre acoustique des modèles E-112 et E-70 du même constructeur ont été utilisés. Il était admis que ces trois modèles présentent des caractéristiques technologiques similaires qui laissent présumer un spectre comparable.

    Les résultats des modélisations sont illustrés sous forme de courbes de puissance maximale (enveloppe) à ne pas dépasser pour chacune des 12 éoliennes E-126 afin d'assurer le respect des valeurs limites fixées par la législation en matière de permis d'environnement (AGW du 4 juillet 2004) et des critères retenus dans le « Cadre de référence pour l'implantation des éoliennes en Région wallonne » (courbes normatives néerlandaises).

    Les puissances acoustiques fournies par ENERCON pour le modèle E-112 pour des vitesses de vent comprises entre 7 et 9 m/s indiquaient clairement que la technologie utilisée par ce constructeur permettrait de respecter les courbes enveloppes définies dans le cadre de l'étude d'incidences.

    Cette manière de procéder s'apparente au principe de l'interpolation inverse en mathématique. Elle a été validée implicitement par le CWEDD et la CRAT qui ont jugé tous deux l'EIE de bonne qualité, sans trouver rien à redire à la méthode utilisée. Le fonctionnaire technique a néanmoins préconisé, dans ses conditions d'exploitation, une campagne de mesure post aedificandi du bruit, in situ, afin de vérifier la bonne conformité des niveaux sonores vis-à-vis des normes en vigueur.



    E - Monsieur le Ministre considère-t-il que le fait d'installer des prototypes à Estinnes constitue une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Comme mentionné au point B, le parc d'Estinnes ne consiste pas en un prototype mais bien en une première installation industrielle sous forme de parc du modèle E-126 d'ENERCON. En quoi le fait d'étrenner une technologie nouvelle pourrait-il être assimilé à une infraction dans la mesure où cette technologie est correctement encadrée par des conditions d'exploitation?



    F - Monsieur le Ministre peut-il nous préciser la valeur de l'étude d'incidence datant de 2005 ?

    Le Code de l'Environnement prévoit le contrôle de la qualité d'une EIE par des organes tels que le CWEDD, la CRAT ou la Cellule EIE de la DGO3. Les deux premiers ont clairement confirmé la bonne qualité de l'étude dans les avis rendus à l'occasion de leur consultation dans le cadre de la procédure qui a abouti à l'octroi du permis dont objet. Le CWEDD précise même que « Les autorités compétentes y trouveront les éléments pour prendre leur décision ». Cette étude n'a en outre appelé aucune remarque dans le chef de la cellule EIE. De l'avis d'experts en la matière, tout porte donc à croire que cette EIE était effectivement de bonne qualité, même si compliquée dans sa mise en œuvre, étant donné les inconnues qui planaient alors sur la technologie innovante.



    G - Lors de l'inauguration par le commissaire européen Piebalgs, personne ne cache la puissance des éoliennes (7 MW). On parle sur internet (site ENERCON) de 7,5 MW. L'objet de l'arrêté octroyé spécifie un transformateur électrique de puissance unitaire comprise entre 5 et 6 MVA. Monsieur le Ministre considère-t-il cette situation comme une infraction à l'arrêté d'octroi du permis?

    Ces machines ont été réalisées dans le respect total des conditions imposées dans l'arrêté d'autorisation du fonctionnaire technique et du fonctionnaire délégué.

    Il est vrai que le permis accordé pour le parc d'Estinnes l'a été pour 11 machines d'une puissance unitaire de 6 MW. Mais, le jeune âge de cette technologie ne permettait pas de soupçonner toutes les potentialités de ces engins. Il s'avère en effet que moyennant des adaptations de courbes de puissance et d'autres paramètres techniques, ces machines seraient capables de produire une puissance non pas 6 MW mais bien de l'ordre de 7 à 7,5 MW.

    Quoi qu'il en soit, la production actuelle est conforme à celle autorisée dans le permis accordé et rien ne peut être reproché à son promoteur.

    Si, à l'avenir, Windvision souhaitait vouloir exploiter les turbines au maximum de leur productivité, cette transformation devra satisfaire les dispositions de l'article 10, §1er, 2° (permis d’environnement portant sur l'exécution ou la transformation d'un établissement de classe 1), voire de l'article 10, §2 (inscription au registre) du décret du 11 mars 1999 relatif au permis d'environnement.
    Il n'y a donc aucune infraction au permis en l'occurrence.



    H - Est-il exact qu'il existerait un transformateur installé en terre en plein milieu du parc éolien d'Estinnes?

    Les éoliennes sont équipées de transformateur de puissance convertissant la basse tension produite par la génératrice en moyenne tension (30kV). Ces transformateurs sont situés dans la tour de l'éolienne.

    Les éoliennes sont reliées ensemble par groupe de 3 ou 4 machines, puis des câbles enfouis à une profondeur de 80 cm à 120 cm acheminent le courant produit vers le poste de transformation 30/70 kV situé dans la zone industrielle de Harmignies, en vis-à-vis du poste électrique Elia déjà présent sur site et alimentant la région en électricité.

    L'énergie produite par les éoliennes est soit consommée localement, soit injectée dans le réseau électrique via le poste Elia de Harmignies.

    Il n'y a donc pas de transformateur installé en terre en plein milieu du parc d'Estinnes.



    I- Quelle est la distance par rapport au pipe-line de l'OTAN?

    La distance de garde recommandée par l'étude de risque et égale à la hauteur du mât (141 mètres) est respectée par toutes les éoliennes du parc. L'éolienne 3, la plus proche, est située à 155 mètres de l'oléoduc.



    J - Quelle est la durée du phénomène d'ombre portée pour la cité du Moustier à Bray? Le fait que ces ombres balaient la chaussée Binche/Mons (très fréquentée) ne constitue-t-il pas un risque pour les usagers de cette route? Peut-on considérer l'ombre d'un mât au soleil couchant dans la cuisine d'une maison comme une nuisance? Y-a-t-il ou non infraction en l'espèce? Comment Monsieur le Ministre compte-t-il y remédier?

    Sur la carte jointe en annexe (carte 08b - ombre - 5MW PM), les récepteurs Ra18 et Ra19 situés à proximité de la cité Moustier indiquent une durée maximale annuelle d'ombre portée de respectivement 11 h et 13 h, ainsi qu'une durée maximale quotidienne d'ombre portée de respectivement 9 min et 11 min.

    Un phénomène d'ombre portée est donc possible à l'intérieur des habitations de la cité Moustier orientées en direction du parc, mais la durée de ce phénomène reste bien en-deçà des limites imposées par le permis délivré et des limites recommandées par le cadre de référence.

    La perception dynamique du phénomène d'ombre portée n'est absolument pas problématique étant donné la faible période pendant laquelle l'automobiliste est soumis à l'ombre portée d'une pale (vu la vitesse moyenne d'un véhicule sur une route nationale prioritaire comprise entre 50 et 70 km/h, soit 13,8 et 19,4 m/s). De plus, cette pale étant elle-même mobile et les machines étant largement espacées (condition nécessaire à leur bonne productibilité), cet effet n'est pas en mesure de provoquer une gêne. Il est, en tous cas, beaucoup moins perturbant que celui qui résulterait d'un alignement d'arbres le long d'une avenue arborée orientée Nord-Sud, le matin ou le soir, lorsque le soleil est en incidence faible sur l'horizon. Dans ce dernier cas, la répétition cadencée des alternances ombre/soleil qui suit en permanence. la trajectoire du véhicule peut se révéler beaucoup plus incommodante.

    L'ombre du mât fixe de l'éolienne dans la cuisine d'une maison provoque autant de nuisance que l'ombre d'un arbre dans la cuisine de cette même maison. C'est le caractère dynamique de la partie mobile de l'éolienne (le rotor) qui provoque le phénomène d'ombre portée ou encore « d'ombrage stroboscopique », comme il est aussi appelé à tort! Ce n'est cependant pas le fait de la partie statique de la machine (le mât).

    De plus, si des dépassements de durée d'ombre portée devraient se produire (norme imposée :: max 20 min/jour (plus contraignant que le CdR qui préconise 30 min/jour) et max 30 h/an), toutes les éoliennes du parc d'Estinnes sont équipées d'un module opérationnel de contrôle de l'ombre portée (« shadow module »). Ce module a été programmé de telle sorte que les éoliennes s'arrêtent automatiquement lors des périodes critiques définies à l'avance et lorsque la luminosité ambiante est suffisante pour créer une ombre portée.

    Les périodes d'arrêt potentielles ont été calculées par des simulations informatiques en prenant en compte un ensoleillement de 100 % sur toute l'année. Ces périodes d'arrêt ont ensuite été paramétrées dans le système de contrôle des éoliennes de manière individuelle. Trois capteurs de luminosité sont installés sur chaque éolienne, au bas de la tour. Ils sont disposés à 120° les uns par rapport aux autres pour conserver une exposition permanente au soleil. La luminosité ambiante est donc mesurée en permanence. Cette donnée, couplée à la programmation de l'éolienne, est prise en compte pour arrêter la machine lors des périodes prédéfinies dans le système de contrôle.

    En conséquence, il ne saurait jamais y avoir d'infraction dans ce domaine, vu l'utilisation du « shadow module ».
    Un courrier informant le Fonctionnaire technique compétent de la mise en place opérationnelle de ce module sur chaque éolienne lui a été envoyé par l'exploitant en date du 29 avril 2010.



    K - Est-il exact que ce parc éolien est à la base d'une émission « anormale» de basses fréquences?

    Il est exact, en ce qui concerne le parc éolien de Windvision à Estinnes (11 x 6 MW autorisés), qu'un bruit anormal et exceptionnel est apparu pour certaines conditions de vent en janvier et février 2010. Des dépassements de puissance sonore (dans la gamme des basses fréquences, autour de 100 Hz) au droit de certaines habitations ont été relevés au printemps 2010. Très vite, par précaution, le promoteur, en collaboration étroite avec le constructeur, la firme allemande ENERCON GmbH, a pris les mesures qui s'imposaient dans le court terme afin de limiter de manière certaine le bruit à l'immission au droit desdits riverains à un niveau inférieur à la celui de la norme imposée.

    Pour cela, les éoliennes fonctionnent depuis lors en mode réduit la nuit (bridage de la puissance des éoliennes), dans l'attente d'une solution durable au problème rencontré. Selon une première estimation, l'adaptation du mode de fonctionnement des éoliennes en période nuit a pour conséquence une diminution de production de l'ordre de 10 à 15%.

    Enercon a déjà réalisé plusieurs campagnes acoustiques à Estinnes, dans différents parcs en Allemagne et également en laboratoire. La société allemande travaille d'arrache-pied sur l'optimisation de la programmation des éoliennes mais aussi sur l'optimisation de la structure des machines, car le problème est essentiellement structurel, conséquence du jeune âge de ce type de machine (E-126). Le parc d'Estinnes constitue, rappelons-le, la première implantation mondiale en production industrielle des E-126.

    Le permis unique délivré pour l'implantation et l'exploitation du parc d'Estinhes prévoyait qu'une fois la totalité du parc construit, une campagne de mesure acoustique serait réalisée par le promoteur. Le parc est maintenant terminé à 100 % et donc, en conformité avec les impositions du permis, le promoteur a réalisé ente janvier et début février 2011, la campagne de mesure imposée. Néanmoins, étant donné la proximité dans le temps, les conclusions de ces mesures, toujours en cours d'analyse, ne nous sont pas encore connues.

    Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne l'impact acoustique du parc, il apparaît dans les grandes lignes que:
    - aucun problème n'est rencontré, de nuit (en mode bridé), pour des vitesses de vent comprises entre 3 et 5 m/s; dans ce cas, le niveau sonore global au droit du plus proche riverain est inférieur à la norme de 6 à 11 dB[A] ;
    - pour les vitesses de vent de l'ordre de 8 à 9m/s, une fréquence en émergence tonale autour de 100 Hz est bien constatée (il s'agit du bruit anormal en cours de résolution) ;
    - pour des vents faibles (mais de vitesse supérieure à 5 m/s), la puissance acoustique est à la limite inférieure des normes autorisées.

    Plusieurs solutions se mettent en place suite aux travaux d'Enercon qui ne lésine pas sur les moyens pour arriver à remédier à la situation (reconstitution à l'identique sur leur prototype en Allemagne des conditions d'exploitation rencontrées à Estinnes, mise en place d'un véritable banc de test où d'innombrables capteurs enregistrent les différents paramètres de la machine, équipe dédicacée aux traitements des données recueillies et à solutionner le problème, etc. .. ).

    Dans un premier temps, une meilleure isolation phonique des nacelles est prévue, sur toutes les machines; ceci consistera en une amélioration mais pas en une résolution définitive du problème.

    L'optimisation des paramètres de fonctionnement de la génératrice a déjà permis de réduire fortement la présence de la tonalité qui apparaissait à certaines vitesses de vent. La société Enercon travaille toujours à l'optimisation de la génératrice pour limiter ce phénomène davantage encore.

    Quoi qu'il en soit, pour l'heure actuelle et moyennant le bridage de nuit, le parc éolien ne génère plus de bruit au-delà des normes autorisées. Cependant, le respect de la norme ne signifie pas nécessairement l'absence de nuisance, celle-ci étant perçue subjectivement de manière différente par les différentes composantes de la population.



    L - Quelles sont les conséquences sur la santé d'une exposition prolongée à ces basses fréquences?
    A-t-on pu vérifier en l'espèce, si l'étude de bruit mesure bien les infrasons et les basses fréquences?

    Dans ce cas précis, aucune incidence sur la santé humaine n'est à craindre. Les incidences à ce niveau ne sont donc pas significatives, vu les faibles puissances acoustiques mises en jeu et la distance séparant les éoliennes des premières fonctions sensibles.

    Les incidences que peuvent impliquer les infrasons et les basses fréquences dans les bâtiments sont principalement des phénomènes de résonance, c'est-à-dire l'établissement d'ondes stationnaires dans des pièces closes.

    Les infrasons et basses fréquences se propagent sur de longues distances car ils ne subissent que très peu ou pas du tout les effets d'absorption de l'air ou des obstacles rencontrés. En effet, l'absorption d'une onde est maximale par des matériaux dont l'épaisseur avoisine le quart de sa longueur d'onde. Or cette épaisseur dans le cas des infrasons peut atteindre plusieurs mètres.

    Les infrasons et basses fréquences peuvent présenter une gêne si les niveaux sonores de ceux-ci à l'immission sont proches ou supérieurs à leur seuil d'audibilité. Les niveaux sonores des infrasons n'atteignent pas leur seuil d'audibilité.

    Lors des premières mesures réalisées sur· site, une mesure de spectre a montré l'absence d'infrasons ou de basses fréquences susceptibles de générer des nuisances pour la santé.



    M - Quelle est la position du Gouvernement wallon face à une situation qui suscite l'inquiétude compréhensible et croissante d'un certain nombre de riverains?

    Dès que nous avons eu connaissance du problème au début de l'année 2010, le nécessaire a été fait via l'administration. Des solutions ont été apportées de manière à répondre aux inquiétudes des riverains.

    Depuis de nombreux mois, je n'ai plus reçu aucune interpellation sur ce sujet, signe que les différents intervenants ont trouvé réponse à leurs interrogations. Le suivi continue et, le cas échéant, je réagirai en conséquence et en proportionnalité car en finalité il est bon de rappeler que les éoliennes génère largement moins d'inquiétude et de risques que d'autre mode de production non renouvelable et plus classique.



    Annexe : carte 08b d'ombre portée - 5MW - PM