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Le coût élevé de l'éolien pour le contribuable

  • Session : 2013-2014
  • Année : 2013
  • N° : 99 (2013-2014) 1

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  • Question écrite du 24/10/2013
    • de EERDEKENS Claude
    • à NOLLET Jean-Marc, Ministre du Développement durable et de la Fonction publique

    « L'éolien coûte cher au contribuable », ainsi titrait la Dernière Heure dans un article signé Stéphane Tassin prévoyant, pour l'implantation d'une éolienne à Perwez, dans le Brabant wallon, un retour sur investissement de 567,90 %, auquel il faut ajouter les certificats verts.

    Les informations communiquées par M. Stéphane Tassin sont-elles correctes et Monsieur le Ministre peut-il confirmer ce qu'a été le rendement dans le cas précis cité par le journaliste et le nombre de certificats verts ainsi accordés à ce promoteur éolien ?
  • Réponse du 18/11/2013
    • de NOLLET Jean-Marc

    Certains chiffres de rentabilité repris par la presse relèvent de l’imaginaire plus que de la réalité des projets. Pour en avoir le cœur net, l’administration de l’énergie a effectué une analyse fouillée sur la base des informations à la Direction de l’économie, qui dispense les aides à l’investissement, à la centrale des bilans ainsi qu’au sein de la Direction de l’Énergie. Aucun projet éolien, situé à Perwez  ou ailleurs, ne correspond aux chiffres avancés dans la DH.

    On peut d’ailleurs émettre des doutes sur le sérieux de l’analyse inspirée par le MR, qui fait une grossière erreur de calcul : le retour sur investissement de l’année considérée, à savoir le bénéfice de l’année divisé par le montant de l’investissement, s’il fallait en croire les chiffres présentés dans l’article, serait de 99 % et jamais de 567,9 %. 

    De plus, dans l’exemple que l'honorable membre relaie, on ne trouve pas trace ni de la date de l'investissement, ni du montant des fonds propres, et on ne précise pas si les bénéfices sont avant impôts ou après impôts, une nuance d'importance. Il est dès lors impossible de savoir, dans le cas évoqué, après combien d’années ces bénéfices ont été constitués.

    Par ailleurs, ce ratio (ROI) n’est pas utilisé pour déterminer la rentabilité d’un projet, celui-ci ne tenant pas compte de l’évolution du coût de l’argent dans le temps et n’étant pas actualisé. La rentabilité d’un projet de type industriel comme le grand éolien ne se calcule généralement pas par rapport aux fonds propres, mais par rapport à l'investissement total (return on investment). La rentabilité sur fonds propres (return on equity) est un souci d'actionnaire lorsqu’il détermine s'il est préférable d'injecter des liquidités propres ou de bénéficier de l'effet de levier du crédit bancaire. Enfin, la rentabilité se calcule sur la durée de vie économique du projet considéré, et non sur une seule année.

    Pour le grand éolien, la rentabilité de référence utilisée par la CWaPE pour le calcul du niveau de soutien à travers les certificats verts est précisée dans un arrêté ministériel de mon prédécesseur à l’énergie qui est toujours en vigueur. Elle s’élève à 8 %, ni plus ni moins ! Soit un niveau jugé raisonnable par la plupart des acteurs pour continuer à assurer l’attractivité des investisseurs, qu’ils soient publics ou privés. Ce niveau de rentabilité, appliqué à une série d’hypothèses technicoéconomiques d’une installation type, sert de base à la CWaPE pour la détermination du facteur ‘k’ (facteur de réduction du soutien entre la 11e et la 15e année) pour l’ensemble des projets éoliens. La CWaPE se base également sur ce niveau de rentabilité pour la détermination de la durée exacte d’octroi éventuel du prix minimum garanti d’un projet particulier, si la demande en est faite.

    Certains projets éoliens en fonction ont pu bénéficier d’une rentabilité supérieure à 8 %, parce qu’ils étaient favorablement situés à proximité du réseau ou que le gisement venteux est particulièrement présent sur le site. Mais jamais on n’arrive aux taux de rentabilité farfelus que l'honorable membre relaie dans sa question.

    Partons d’un exemple simple d’un projet dont les paramètres sont particulièrement favorables. Soit un parc éolien de 6 MW pour un investissement total de 9 millions d'euros, qui correspond à un coût spécifique (cf. CWaPE, Etude 3E, etc.) de 1,5 million d'euros par MW installé. Situé sur un site dont le gisement venteux est supérieur à la moyenne, le facteur de charge est de 2.500 heures/an. Le parc de 6 MW produit donc un maximum de 15.000 MWh par an.

    Sur le marché, le producteur peut valoriser son électricité produite à un bon prix, 40 euros/MWh (prix de marché actuel maximum), et il dispose d’un contrat historique valorisant son certificat vert à un prix de 80 euros. Au total, le revenu de ce parc est donc de 120 euros par MWh produit, ce qui donne un revenu annuel de 1,8 million EUR par an. Dans cet exemple simple et extrêmement optimiste, le retour sur investissement brut serait de 20 %, lequel sera ensuite réduit par les coûts opérationnels de l’année et les impôts sur le bénéfice. Même dans ce cas optimal, on est donc bien loin des chiffres inspirés et faussement calculés par le MR.


    Et dans la majorité des parcs en projet actuellement, je rappelle que la rentabilité globale des parcs éoliens s'est fortement réduite par rapport à il y a deux ou trois ans, du fait d'une conjonction de facteurs indépendants :
    - baisse du prix des certificats verts
    - baisse du prix de gros de l'électricité
    - hausse des coûts de développement (mesures agro-environnementales, comptages avifaune, etc.)
    - hausse des coûts de raccordement au réseau.

    Par ailleurs, le nouveau cadre de référence du 11 juillet 2013 comporte une obligation pour les porteurs de projet de proposer une participation jusqu’à 24,99 % du parc éolien au bénéfice des communes ou intercommunales, si la demande en est faite aux développeurs éoliens. Ce dispositif n’empêche nullement les parties de convenir d’un niveau de participation supérieur, si elles le souhaitent.

    Enfin, certains acteurs publics développent leurs propres parcs éoliens (notamment TECTEO), ou jouent un rôle actif dans le développement de certains projets (IDETA, SOFILUX). Enfin, soulignons le projet de la SOFICO qui, en sa qualité de gestionnaire du réseau structurant, développe actuellement un plan d’implantation de grandes et de petites éoliennes le long des autoroutes de Wallonie, soutenu par le Gouvernement wallon. Un projet qui, s’il se réalise, sera probablement majoritairement public.