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Retour sur le Colloque « La démocratie à l’heure des réseaux sociaux » du 7 février 2024

( 15-02-2024 )

Poursuivant sa volonté d’ouvrir son rôle en tant que lieu privilégié de discussions et de débats démocratiques, le Parlement a accueilli ce mercredi 7 février 2024 un colloque abordant la délicate et multidimensionnelle question des rapports qui peuvent se nouer entre la démocratie et les réseaux sociaux.

 

Dans un premier temps, Jérôme Jamin (ULiège) a pu souligner le rôle fondamental joué par les désaccords dans le fonctionnement de nos démocraties. Dans ce cadre, les différences d’opinion doivent pouvoir permettre le dialogue et non diviser, exclure, enfermer ; un effet pourtant favorisé par le fonctionnement des réseaux sociaux. Il a illustré son propos en prenant l’exemple de Donald Trump dont l’emploi de publicités hostiles ciblées a eu un impact sur la qualité de la campagne présidentielle. Il a poursuivi en pointant les atteintes au pluralisme engendrées par le fonctionnement obscur des algorithmes qui tendent à identifier des préférences et à enfermer, renforçant la dissidence de certaines communautés d’opinion qui s’isolent. Enfin, le manque de responsabilité et de concurrence des plateformes par rapport à des choix éditoriaux masqués pose problème par rapport aux limites démocratiques qui encadrent l’usage de la liberté d’expression.

Laurie Pazienza, consultante et activiste en justice climatique et sociale, a ensuite pris le relais en détaillant l’emploi des réseaux sociaux pour peser sur l’agenda politique, amener les citoyens et les politiques à agir. Dans un exposé personnel, elle a exposé une recette et des exemples, s’appuyant sur des plateformes selon plusieurs phases : informer, interpeller les acteurs concernés pour enfin culminer dans des actions de terrain. Ces réseaux permettent de structurer des actions à travers les frontières mais aussi de rallier des personnalités ou des influenceurs. Elle a souligné l’importance de la maitrise des codes des réseaux sociaux comme la copublication ou le story telling  en enfin la veille pour relever ce qui fonctionne. Elle a conclu en indiquant que le côté humain reste fondamental pour maintenir les liens et accueillir les nouveaux venus.

Jérémy Dodeigne (UNamur) s’est emparé du sujet en rappelant le caractère ambivalent des réseaux sociaux sur la démocratie : initialement perçus positivement et dotés de vertus, ils sont désormais le plus souvent stigmatisés pour une série de vices. S’appuyant sur des éléments de la littérature, il a distingué le débat musclé, qui reste démocratique, de la lutte cherchant à détruire l’adversaire devenu un ennemi. Il a  d’abord montré que les réseaux sociaux participent à former des cercles vicieux et favorisent les publications agressives et outrageuses, qui génèrent généralement plus de « likes ». La surenchère est alors susceptible de primer et ouvre la porte à l’intolérance et à une certaine permanence de l’hostilité. Des études montrent néanmoins un effet d’usure de l’emploi de ces attaques. Les effets varient également en fonction des systèmes politiques. Un autre vice relevé  tient en ce que les discours outrageux « online » peuvent faciliter le passage à l’acte « offline ». Enfin, l’abaissement de la qualité du débat démocratique, portée sur des conflits de personnes au détriment de la richesse de contenu est un autre vice. Monsieur Dodeigne a enfin averti des effets de myopie politique, en invitant à prendre une hauteur historique, à ne pas surinterpréter des phénomènes animés par quelques individus sur les réseaux sociaux et à surveiller la contamination des autres arènes autrefois prémunies, comme les assemblées parlementaires.

Enfin Sébastien Brunet (IWEPS) a placé en perspective la question par rapport au fonctionnement de nos démocraties représentatives, systèmes à la fois attrayants pour ceux qui en sont éloignés mais aussi en proie à une profonde défiance. Le dernier Baromètre social de la Wallonie (BSW) vient illustrer cette analyse en montrant une chute dramatique de la confiance portée aux institutions politiques, à l’exception du niveau communal. La confiance donnée aux réseaux sociaux est encore plus basse alors que leur consommation continue d’augmenter. Pourtant, l’enquête indique un attachement au principe démocratique et un refus de l’autoritarisme ainsi qu’un désir de décisions plus rapides et transparentes. On peut y voir que nos institutions démocratiques ne parviennent pas à suivre les changements profonds dont les réseaux sociaux sont une expression. Différents scénarios peuvent être imaginés pour stimuler notre réflexion et aborder une évolution nécessaire de nos systèmes de démocratie représentative à l’heure des réseaux sociaux, en s’appuyant sur ces derniers éventuellement.

 

Le Parlement de Wallonie tient à remercier tous les intervenants pour leurs présentations enrichissantes ainsi que le public venu en nombre pour les échanges de qualité conduits par Arnaud Ruyssen, modérateur.

 

Toutes les interventions et les échanges avec le public sont disponibles sur la chaîne ParlWalTV.

 

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